vendredi 13 octobre 2017

En transition vers le tittytainment

Article mis à jour le 4 avril 2024.


(Mais de quoi va-t-il encore nous parler ?)

La transition énergétique par les nuls

    Transitio a vraiment évolué depuis ses débuts. L’idée de créer ce site m’était venue en 2011 lors de mon bref passage à la commission énergie du parti des Verts. Ingénieur thermicien, j’avais alors une idée très précise de la crise énergétique et de l’urgence de la transition qui s’imposait, transition énergétique bien sûr.
    J’ai fini par quitter les Verts peu après qu’ils soient devenus EELV, quand j’ai constaté que la plupart des gens que j’y côtoyais étaient surtout des ambitieux qui voulaient avant tout faire une carrière politique. Lorsque j’étais de mauvaise humeur, je disais que beaucoup étaient entrés chez les écologistes parce qu’ils n’avaient pas pu trouver une place au PS. La suite des événements m’a donné raison puisque ceux qui m’agaçaient le plus ont fini par vendre leur âme au PS pour avoir des postes de ministres ou de députés. Il y en a même un qui a dernièrement rejoint notre banquier président et est devenu président de l’Assemblée nationale !
    Je connais les arguments de ces carriéristes. Ils prétendent qu’il faut faire des concessions si l’on veut pouvoir gouverner et changer les choses. Certains affirment même que tous les moyens sont bons pour gagner. Mais ce faisant, ils ont oublié ou ignoré qu’en agissant ainsi, on devient ce que l’on a combattu.
    Qu’ont-ils gagné ces opportunistes ? Quelles sont les réformes écologiques qu’ils ont réussi à faire passer ? Quel souvenir par exemple garde-t-on aujourd’hui du poste de ministre de Cécile Duflot, l’ancienne secrétaire générale des Verts, puis de EELV ? La Loi Duflot (devenue Loi Pinel) ! Une loi servant avant tout à défiscaliser !!!


Le nucléaire n’est pas le seul problème

    Le milieu professionnel dans lequel j’évolue m’a aidé à très vite comprendre que la France allait louper le coche de la transition énergétique. La raison la plus évidente est bien sûr le pouvoir exorbitant du lobby du nucléaire, et ce, malgré l’impasse dans laquelle il se trouve. En effet, persister dans l’erreur du nucléaire coûterait à présent aussi cher que de l’arrêter ! Nous en sommes réduits à choisir, soit de rénover et surtout sécuriser les centrales existantes, mais aussi construire de coûteux EPR (Lire cet article) ; soit démanteler ces centrales, ce qui, indépendamment du coût exorbitant, pose un problème de faisabilité technique. Certains préconisent même de juste les fermer et d’attendre « quelques années » que la radioactivité diminue un peu afin de permettre les travaux (ou alors c’est peut-être le temps de trouver le budget nécessaire). EDF a même fini par se résigner à admettre que l’électricité produite par les énergies renouvelables était à présent moins chère que celle produite par le nucléaire ! (Lire ce lien)

Transitio critique le système ? (Mais non)

    L’autre raison, plus difficile à admettre ou à comprendre, c’est que la nature même du système économique qui régit les sociétés dans lesquelles nous vivons est un obstacle majeur à une vraie transition.
    Ne vous imaginez pas que je vais me lancer « le couteau entre les dents » dans une charge caricaturale contre le capitalisme ! Que m’importe la nature d’un système économique s’il finit par conduire à un bien être général ! N’est-ce pas après tout ce que le capitalisme a réussi à faire croire aux gens depuis ses débuts ? Travaillez et enrichissez-vous !? Il a eu de plus la grande chance de n’avoir pour seul opposant durant des décennies que le communisme, qui contrairement au capitalisme est une idéologie qui a été pensée pour des hommes qui n’existent pas, et qui pour cette raison a toujours eu à cœur de fabriquer des hommes nouveaux en faisant table rase du passé ! Le capitalisme lui, hélas, correspond aux hommes tels qu’ils sont et plus particulièrement à l’un des comportements de l’espèce humaine qui a longtemps été très efficace, je veux parler de la loi du plus fort. Encore une fois, je n’émets pas de jugement de valeur en écrivant cela. Darwin vous expliquerait mieux que moi que si un comportement permet à une espèce de survivre et de proliférer en assurant le bien-être et la sécurité de tous, c’est qu’il est efficace et profitable à ladite espèce.


La fable du ruissellement

    Les plus forts, appelons-les les plus riches pour faire simple, n’ont jamais été aussi riches qu’à présent, c’est un fait. Leurs dévoués valets-économistes vous expliqueront encore et encore la théorie du ruissellement qui prétend que plus il y a de riches, plus les pauvres bénéficient des retombées de leur excès de richesses ! (Pensez aux mendiants affamés autour de la table de banquets des seigneurs d’autrefois qui attrapaient au vol une cuisse de poulet à peine croquée lancée par le maître las d’avoir trop mangé). Libre à vous de vous satisfaire ou non de cette brillante théorie d’économistes bien nourris. Mais il semblerait malgré tout qu’il ne s’agisse que d’une fable datant des années 80. Ce qui n’a pas empêché notre banquier-président de la ressortir de son coffre (Ce lien raconte l'histoire de cette fable).


    Sachez tout de même que l’OCDE que l’on ne peut guère soupçonner d’être un nid de révolutionnaires assoiffés de sang a publié un rapport en 2014 dans lequel elle s’inquiétait de l’effet nocif sur la croissance économique de la montée des inégalités. Selon de nouveaux éléments mis en évidence dans ce rapport, les inégalités agissent principalement sur la croissance en limitant les possibilités d’instruction des enfants issus de milieux socio-économiques modestes, ainsi que la mobilité sociale et le développement des compétences. Il ressort également de l’analyse que la redistribution, fondée notamment sur les impôts et les prestations sociales, n’est pas en soi un frein à la croissance, à condition que les mesures prises dans ce sens soient conçues, ciblées et mises en œuvre correctement. (Ce lien conduit à ce rapport)
    Ceux qui sont convaincus que tout cela est dans l’ordre des choses et qu’il en sera ainsi encore pour des siècles, ne voient cependant pas que deux paramètres importants ont changé.

Le premier paramètre

    Le premier paramètre est le plus connu. C’est la prise de conscience de la finitude du monde et de ses ressources limitées. Nous en avons souvent parlé sur Transitio et je vous invite à regarder la petite vidéo qui se trouve sur la page d’accueil qui l’explique très clairement.

    Notre système économique a besoin d’une croissance infinie et se trouve dans l’incapacité totale de penser un arrêt de la croissance, faute d’énergie (lire ce lien) ou de matières premières (lire ce lien) ! Un arrêt de la croissance, cela signifie que les dettes ne seront jamais remboursées...

    Face à la crise dans laquelle nous sommes plongés, nos gouvernants ne sont capables de mettre en place que des solutions qui conviennent au système économique dominant.
Concernant l’énergie, la plupart sont persuadés que l’on pourra remplacer le pétrole qui avait remplacé le charbon qui lui-même avait remplacé le bois (en France on croit bien sûr que ce sera le mortifère uranium).

    Quand bien même nos gouvernants seraient-ils sincèrement convaincus qu’il faut agir, chaque fois ils ne le font qu’en utilisant des solutions inspirées du système économique dominant, c’est-à-dire avec des solutions sensées rapporter de l’argent (mais obsolètes et inefficaces). Le scandale de l’arnaque aux quotas carbone constitue un magnifique exemple ! Diminuer la consommation des énergies carbonées est devenue vital, d’une part pour retarder le choc que provoquera leur raréfaction et d’autre part pour lutter contre le réchauffement climatique. Quelle solution le système a-t-il trouvé ? L’Etat français a créé en 2007 un grand marché des quotas carbone. L’idée étant d’acheter et vendre des quantités de carbones allouées à chaque gros émetteur de CO2. Mais le 9 décembre 2009, l’organisation européenne des polices publia ce communiqué dévastateur : « Le marché européen des échanges de quotas de CO2 a été victime d’échanges frauduleux depuis dix-huit mois. Dans certains pays, jusqu’à 90 % du marché du carbone était le fait d’activités frauduleuses. » Cette arnaque à la TVA a coûté en un an, 1,6 Milliards d’Euros à la France ! Lisez cet article du journal Le Monde qui explique le détail de cette escroquerie née de la délinquance financière, avec son lot d’extorsions, de règlements de comptes et d’assassinats : "Histoire de l'arnaque au carbone"

Cette petite vidéo explique bien l'arnaque.


    Personnellement, ce qui me choquait à l’époque, c’était que les gens ayant des revenus très modestes qui étaient chauffés par des réseaux de chaleurs, payaient dans la facture de leur chauffage ces fichus quotas, en raison du fait que les centrales thermiques desservant les réseaux de chaleur étaient assujetties à cette taxe (et pas les petites chaudières). Mais bon, tout le monde s’en foutait… Vous pouvez lire mon article rédigé en 2012 sur ce sujet : "La biomasse sans langue de bois"

There is no alternative (Comme disait Margaret Thatcher)





    Pas d’alternative au capitalisme, bien sûr ! En France on dit qu’il n’y a pas de plan B.
En effet, les seules solutions que nos gouvernants sont capables de mettre en place, doivent être validées par les lobbies de l’énergie et de l’industrie (tout comme leurs politiques doivent être validées par les marchés financiers). Les mesures écologiques doivent avant tout pouvoir rapporter de l’argent si l’on veut les appliquer. Pas seulement de l’argent pour les financer, mais surtout de l’argent pour enrichir les actionnaires. Le problème des énergies renouvelables, ce n’est pas qu’elles ne sont pas efficaces, le vrai problème c’est qu’il est difficile pour les grands groupes de les monopoliser.
    Il faut se rendre à l’évidence, le capitalisme ne peut pas être vert, pas plus qu’il ne pouvait être rose ou rouge ! Ce n’est pas un jugement de valeur, ce n’est ni bien ni mal. J’ai déjà écrit ailleurs dans Transitio ce que je pensais de l’idée de prendre le pouvoir.


Le second paramètre (Nous y voila!)

    Vous aurez remarqué que la question de l’emploi commence à poser un sérieux problème. Les mêmes économistes donneurs de leçons qui vous expliquaient la théorie du ruissellement vous expliqueront avec assurance que de nouveaux métiers remplaceront les métiers des services, métiers qui avaient remplacés ceux de l’industrie qui avaient remplacés ceux de l’agriculture. Néanmoins, force est de constater que des millions d’emplois ont disparu. La plupart ont d’abord été délocalisés, pour de bonnes raisons économiques bien sûr (augmenter les marges bénéficiaires et verser de mirifiques dividendes aux actionnaires). Les chômeurs touchés par ces délocalisations ou re-concentrations devraient peut-être suivre les conseils de mobilité donnés par notre banquier-président : « Bien sûr la mondialisation peut être cruelle. Mais 2 millions de Français travaillent aujourd’hui à l’étranger ! ». On a fermé les usines Moulinex en France pour produire les micro-ondes en Chine, les aspirateurs en Pologne et les moteurs à Hongkong ? (Lire ce lien) Faites vos valises maudits franchouillards qui êtes si attachés à vos villages, villes et familles !
Puis-je me permettre de vous donner un petit conseil avant de suivre le conseil de notre bienveillant banquier-président ?
Inutile de faire vos valises, chers concitoyens, car il est temps que je vous explique ce qu’est le second paramètre…

Vous ne servirez bientôt plus à rien…

    Après la délocalisation qui a fait de notre pays un désert industriel, voici la robotisation. Celle-ci est en train de supprimer des millions d’emplois. Transitio vous en avait déjà parlé lorsque j’avais traduit en 2014 un article de The Economist : « En transition vers le chômage de masse » (A lire absolument). Les prédictions de cet article étaient pour le moins alarmistes. Selon la Banque Mondiale, entre 1990 et 2007, 670.000 emplois industriels ont été détruits et depuis 10 ans le phénomène s’est accéléré.
    Cela n’empêche pas certains, (probablement les mêmes que ceux qui pensent que l’on trouvera une nouvelle énergie miraculeuse pour remplacer les énergies fossiles), de minimiser l’impact de la robotisation en imaginant que cette nouvelle révolution sera créatrice de nouveaux emplois. 
    Mais ne rêvons pas, cela ne va pas se passer comme au 19ème siècle avec la mécanisation. Il ne vous suffira pas d’apprendre à devenir de nouveaux mécanos pour bénéficier de ce fabuleux « bond en avant ». Non, car ces robots seront d’une complexité extrême et ils bénéficieront d’une intelligence artificielle qui, ne vous vexez pas, surpassera très vite la vôtre comme la mienne. Comme le dit Laurent Alexandre, chirurgien, énarque, auteur de romans et de BD, transhumaniste, chroniqueur au journal Le Monde, spécialiste des nouvelles technologies et ardent soutient de notre président : « Dans le futur, seuls les gens très intelligents et très doués trouveront du travail ».

    Pour que vous vous fassiez une idée du personnage, je vous propose de visionner la vidéo de cette conférence à l'école polytechnique pendant laquelle il a donné libre cours à son discours de grand visionnaire. Attendu qu'il s'adresse à de futurs dieux, j'espère que vous comprendrez...


    Méfions-nous malgré tout des propos de ce gourou auto-proclamé de l’intelligence artificielle, qui fait partie du gang des transhumanistes bien connus pour leur dégoût de l’humanité et leur aspiration à une vie éternelle. Vous pouvez lire cet article à propos du livre qu’il vient de publier : « La Guerre des intelligences ».

    Je vous propose avant de poursuivre la lecture de ce trop long article, de regarder cette vidéo réalisée par l’émission #DATAGUEULE qui traite brillamment du sujet et dont la conclusion est plutôt optimiste. Son titre : « La Faim du travail ».



Les gens qui ne sont rien

    Cela a commencé discrètement, derrière les murs des usines. Mais regardez bien autour de vous, plus personne aux péages des autoroutes, presque plus de guichets dans les gares ni dans le métro, de plus en plus de caisses automatiques dans les magasins. La chasse aux petits métiers est ouverte et elle ne fait que commencer ! Les petites gens n’auront bientôt plus le droit d’exister, puisque qu’ils ne pourront plus ni travailler ni se loger, ni vivre. Et gare à ceux qui protestent ! Notre banquier-président n’hésite pas à les insulter en les traitant de fainéants ou d’illettrés ! Il a même été jusqu’à évoquer « les gens qui ne sont rien ». Vous ne serez pas étonnés si vous avez entendu Laurent Alexandre parler des inutiles dans la vidéo ci-dessus.
    Rappelez-vous les propos choquants de notre Président. C'était avant que l'on se rende compte durant la pandémie, que des "gens qui ne sont rien", comme des infirmiers, des boulangers, des livreurs,... étaient indispensables au fonctionnement de la société



    Il y en a d’autres paroles aussi affligeantes listées sur cette page : « 6 phrases polémiques de Macron ».

    Petite manifestation de mécontentement (à laquelle j'ai participé) des gens qui ne sont rien, le 3 juillet 2017, place de la République à Paris.


La géniale solution de Zbigniew au forum sur l’état du monde en 1995 !

    N'essayez pas de vous rassurer en vous disant que ces paroles sont « sorties de leur contexte ». La prise de conscience de notre grandissante inutilité par nos dirigeants n’est pas nouvelle !

    Un forum sur l’état du monde s'est tenu du 27 septembre au 1er octobre 1995 à l'Hôtel Fairmont de San Francisco. L'objectif de la rencontre était de déterminer l'état du monde, de suggérer des objectifs désirables, proposer des principes d'activité pour les atteindre et d'établir des politiques globales pour obtenir leur mise en œuvre. Les cinq cents hommes politiques, leaders économiques et scientifiques de premier plan réunis (parmi lesquels Mikhaïl GorbatchevGeorge Bush pèreMargaret ThatcherVáclav HavelBill GatesTed Turner, etc.) sont arrivés à la conclusion que « dans le siècle à venir, deux-dixièmes de la population active suffiraient à maintenir l'activité de l'économie mondiale ». Le problème se poserait alors sur la manière de gouverner 80% de la population restante, superflue dans la logique libérale, c’est à dire ne disposant ni d’un travail ni d’un quelconque talent à vendre, ce qui nourrirait une frustration croissante et dangereuse.

Le tittytainment !
Zbigniew Brzezinski

    C'est au cours de ce forum que l’un des participants, le démocrate américain Zbigniew Brzezinski, membre de la commission trilatérale et ex-conseiller du président des États-Unis Jimmy Carter, a proposé un tout nouveau concept, le "tittytainment", un savant cocktail de nourritures physiques et psychologiques qui endormirait les masses et contrôlerait leurs frustrations et leurs protestations prévisibles. Brzezinski a expliqué l'origine du terme tittytainment, comme une combinaison des mots anglais « tit » (« sein » en anglais) ou « titillate » (« taquiner pour exciter gentiment » en anglais) et « entertainment » le terme anglais pour divertissement. La connotation sexuelle y est moins présente que l’allusion à l’effet endormant et léthargique que l'allaitement maternel produit chez le bébé quand il boit. Ce politologue avait soutenu sa thèse de doctorat en 1953 sur la question du « totalitarisme soviétique » et son père, diplomate polonais au Canada en 1939 n’avait pu retourner dans son pays pour d’évidentes raisons (le pacte germano-soviétique). C’est peut-être pour cela qu’il a imaginé cette solution plutôt douce à notre inutilité. Mais ne peut-on imaginer qu’un jour, quelqu’un de moins bien intentionné ait une autre solution ?

    Juste une petite précision, vous aurez bien compris j’espère, que si vous ne travaillez pas et que vous êtes stupides comme vos pieds, mais que vous faites partie de la richissime minorité de la population, vous n’aurez pas de souci à vous faire. Ce n’est pas Laurent Alexandre, le gourou de l’intelligence artificiel évoqué plus haut, opulent exilé fiscal réfugié à Bruxelles qui vous dira le contraire. (Lire ce lien).


En transition vers le tittytainment !

    Le tittytainment est actuellement discrètement mis en œuvre. On constate un abêtissement général de la population et même une baisse régulière du quotient intellectuel. Les programmes scolaires ont tous été revus en raison du fait que l’on n’a plus besoin comme par le passé d’une classe moyenne éduquée (à quoi bon des ouvriers qualifiés, des techniciens ou des ingénieurs ?). Il n’y a jamais eu autant de moyens de se distraire. S’amuser est presque devenu une obligation.




    Cette transition, puisqu’il s’agit bien d’une transition se passe presque « en douceur ». Les quelques malheureux qui protestent pour conserver leur travail et un peu de dignité ne représentent qu’une infime minorité et les rares politiques honnêtes qui les défendent sont présentés par les médias comme étant de très dangereux populistes.


Nommer la chose

    Je me demande toujours quelle est la part d’organisation dans tout cela, car je répugne à sombrer dans de ridicules théories du complot. Je me dis qu’il y a peut-être une sorte d’inconscient collectif qui nous fait agir dans un certain sens, en réaction à un changement de notre environnement, "pour le profit de l’espèce" comme dirait Darwin. Mais il suffit malheureusement d’être un peu attentif et de s’informer pour constater que ceux qui mettent en place ce tittytainment savent très bien ce qu’ils font. Parmi les techniques utilisées, il y a, entre autre, l’appauvrissement du langage.

    C’est le célèbres George Orwell qui avait démontré l’efficacité de cette technique dans son livre « 1984 ». Dans le monde de 1984, chaque année, le gouvernement éditait un nouveau dictionnaire de la langue officielle, la novlangue, et chaque année le dictionnaire contenait de moins en moins de mots. L’idée géniale était que plus l’on a un vocabulaire réduit moins on peut élaborer de pensées complexes, voire dangereuses. Les techniques d’ingénierie sociale ont bien progressé depuis l’époque des grands totalitarismes. La violence est devenue presque inutile. A quoi bon brûler des livres comme les nazis ou censurer et emprisonner des auteurs comme les soviétiques ? Alors qu’il est si facile de dégoûter à jamais les gens de la lecture, lors de leur passage à l’école par exemple ? (La lecture étant considérée par les pédagogues comme une pratique élitiste).

    Regardez plutôt cette image, très parlante. Orwell, l'auteur de 1984 craignait que l'on interdise aux gens de lire. Huxley, lui, craignait que l'on dégoûte les gens de lire...





    Comment définir le tittytainment ? Un totalitarisme soft des temps modernes ? Avez-vous lu l’article de Transitio sur Propaganda, le livre publié par Edward Bernays en 1929 ? En voici un extrait :
« L’instruction généralisée devait permettre à l’homme du commun de contrôler son environnement. A en croire la doctrine démocratique, une fois qu’il saurait lire et écrire il aurait les capacités intellectuelles pour diriger. Au lieu de capacités intellectuelles, l’instruction lui a donné des vignettes en caoutchouc, des tampons encreurs avec des slogans publicitaires, des éditoriaux, des informations scientifiques, toutes les futilités de la presse populaire et les platitudes de l’histoire, mais sans l’ombre d’une pensée originale. Ces vignettes sont reproduites à des millions d’exemplaires et il suffit de les exposer à des stimuli identiques pour qu’elles s’impriment toutes de la même manière. »

    Noam Chomsky a écrit quelque part : « La propagande est à la démocratie ce que la matraque est à la dictature. »




    Voilà pourquoi Transitio a décidé de mettre à l’honneur ce mot que vous n’entendez jamais, le tittytainment ! Car si l’on ne nomme pas les choses, on ne peut pas les penser !



    Notons au passage que les empereurs romains, faute d'avoir nommé le concept, l'avaient tout de même bien compris et l'appliquaient avec succès. Rappelons ces vers du poète Juvénal dans sa Satire N°10 : 

Ces Romains si jaloux, si fiers de leurs suffrages,

Qui jadis commandaient aux rois, aux nations,

Décernaient les faisceaux, donnaient les légions,

Et seuls, dictant la paix, ou proclamant la guerre,

Régnaient du Capitole aux deux bouts de la terre,

Esclaves maintenant de plaisirs corrupteurs,

Que leur faut-il ? du pain et des gladiateurs.

"Panem et circenses", du pain et des jeux, et le peuple ne se révoltera jamais...




Petite digression (Désolé)

    Encore un mot sur Zbigniew Brzezinski, pour mieux cerner le personnage, l’étonnant inventeur de ce nouveau concept d’ingénierie social, le tittytainment.

    Il faut tout de même savoir que c’est lui qui a eu l’idée géniale, alors qu’il était le conseiller national en sécurité du président Carter, d’œuvrer de telle sorte que celui-ci signe le 3 juillet 1979 la première directive pour l'aide secrète aux opposants au régime prosoviétique à Kaboul. Il fut l’instigateur de l’opération « cyclope », une campagne de soutien aux moudjahidin au Pakistan et en Afghanistan, dirigée par les services de sécurité pakistanais avec le soutien financier de la Central Intelligence Agency et du MI6 britannique. Une partie du programme de la CIA était dirigée par leur division d'élite des activités spéciales et comprenait l'armement, la formation et la direction des moudjahidines d'Afghanistan. Son idée était de pousser les soviétiques à intervenir en Afghanistan afin que cela devienne leur propre Vietnam. Et c’est en effet ce qui arriva, pendant près de 10 ans, l’Union Soviétique a dû mener une guerre insoutenable pour le régime, un conflit qui a largement contribué à l’effondrement de l'empire soviétique. L’ami Zbigniew a d’ailleurs raconté tout cela dans une interview accordée au Nouvel Observateur en janvier 1998. Qui s'en souvient ? Et qui prend la mesure des conséquences qui perdurent jusqu'à aujourd'hui ?


Sources

    Vous en apprendrez plus sur la page de David N. Gibbs, professeur d’histoire à l’université de l’Arizona : David N. Gibbs
    Le texte complet de son article est téléchargeable en cliquant sur ce lien : "Afghanistan, the Soviet invasion in retrospect".

    Mais faites attention, car vous trouverez sur Internet plein d’articles du style « complot mondial » sur Zbigniew. On le voit même sur une photo avec un militaire afghan présenté comme étant possiblement Ben Laden. (Voir ce lienMéfiez-vous car c’est peut-être comme la photo d’Hillary Clinton que l’on voit serrer la main de Ben Laden, qui est en fait un montage réalisé à partir d’une photo où elle serrait la main du musicien indien Shubhashish Mukherjee en 2004. (Voir ce lien).

    La photo ci-dessous est vraie, on y voit Ben Laden présenté comme un guerrier de la paix...



Conclusion ?

    Parfois, lorsque j’ai des idées noires, je me dis qu’après tout, il n’y a peut-être pas moyen de faire autrement. Comment gouverner des masses aussi importantes de populations ? L'ingénierie sociale, avec sa propagande, est peut-être la condition d'un semblant de démocratie ?
    Regardez bien autour de vous. Quelle est selon vous la proportion de gens qui veulent être vraiment libres et informés ? La liberté implique une prise de risque, le savoir oblige à prendre conscience de notre condition et nous rend souvent malheureux.
    Combien de malheureux dépensent presque un mois de salaire pour posséder le dernier iPhone et pouvoir jouer à Candy Crush, regarder des vidéos de chats et parler de rien à coup de "lol" et de "mdr" ?

    Peut-être n’y a-t-il effectivement pas d’alternative au tittytainment ?...





Bertrand Tièche
04/04/2024

Post Scriptum : 
    Certains irréductibles résistent malgré tout au délire transhumaniste et sa volonté de créer une nouvelle race de dieux. Ils s'appellent entre eux les Chimpanzés du futur. Vous pouvez visiter leur site WEB en cliquant sur l'image ci-dessous.





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