Depuis 2010, Transitio est un site dans lequel j'analyse à ma façon la formidable période de transition que nous vivons. J'ai commencé par me préoccuper de la transition énergétique (pour des raisons professionnelles), mais très vite il m'est devenu évident qu'il fallait s'intéresser également à toutes les autres formes de transitions en cours, économiques, sociétales, etc.
(Transitio.info remplace le vieux site Transitio.net, devenu techniquement obsolète)
Nota au 20/07/2024 :La publication de cet article sur le groupe Facebook "Actu de la paléontologie" a été censurée par son administrateur Bertrand Bordage Léneau, qui de plus m'a bloqué. En vaillant petit soldat décervelé, ce personnage préfère nier le passé de la Terre que de risquer de semer des doutes sur les variations climatiques (ce que je ne fais pas.)
"Nous sommes à la fin d'une période interglaciaire. C'est
mathématique, la glaciation va revenir."
Qui dit cela ? François Djindjian, archéologue et préhistorien français,
spécialiste du Paléolithique supérieur et des méthodes et théorie de
l’archéologie. Ce n'est pas n'importe qui. Il a participé à l’introduction des
mathématiques et de l’informatique en archéologie, notamment l’usage de
l’analyse des données multidimensionnelles. Il a également développé, sous
le nom d’archéologie des processus, une épistémologique globale qui, intégrant
des techniques de structuration et d’apprentissage, permet de reconstituer les
principaux processus qui définissent le fonctionnement systémique des sociétés
du passé.
Ce n'est pas n'importe qui, nous sommes d'accord ? Oui ? Merci.
Je vous conseille de regarder et surtout d'écouter
attentivement cette conférence donnée le 3 juin 2018, à l'occasion du Cycle
"L'espèce humaine face au changement climatique", organisé par le
Muséum d'Histoire Naturelle. Vous allez y apprendre l'histoire conjointe du
climat et de l'humanité au cours des 100.000 dernières années.
Les études du climat et de la préhistoire ont fait toutes
deux des progrès immenses depuis les années 70. Les scientifiques sont à
présent en mesure de reconstituer 1 million d'années de l'histoire du climat et vous allez voir que pour les derniers milliers d'années, le climat a eu des incidences sur l'humanité. Celle-ci a même failli disparaître lors de la dernière glaciation (réduite de moitié).
J'ai déjà évoqué plusieurs fois l'histoire du climat dans
quelques articles sur Transitio, et ce, avec plus ou moins de prudence.
Je vous ai parlé du glacier Jacobshaven(Situé au Groenland) qui a reculé de 12.8 kilomètres et a perdu entre 6 et 9
mètres d'épaisseur entre 1850 et 1903. Ce qui signifie que le présent réchauffement
climatique a commencé en 1850 (fin du petit âge glaciaire), quand la population
ne comptait qu'1.2 milliard d'habitants, c'est-à-dire 6 fois moins que maintenant,et que la
production de CO2 était près de 20 fois moins importante que de nos jours !...
Mais qui suis-je pour
vous parler de cela ? Juste un type qui dévore des livres de science et d'histoire depuis
plus de 40 ans et qui ne risque pas sa carrière en le faisant.
La conférence !
Écoutez la conférence, vous apprendrez comment au cours de la
dernière ère glaciaire, la petite humanité a failli disparaître, tant les
conditions étaient rudes. Les glaciers recouvrirent en grande partie l'Europe,
nombre d'espèces disparurent, la végétation se réduisit à une toundra stérile,
tous les arbres à feuilles caduques disparurent, seuls quelques chênes subsistèrent
dans la péninsule ibérique. A la fin de l'ère glaciaire l'humanité était
réduite à quelques centaines de milliers d'individus sur toute la planète.
"Si le
chasseur cueilleur a réussi à survivre, pour quoi nous, avec notre technologie
fantastique n'arriverions-nous pas à survivre ?"
Il ajoute :
"Il n'y a pas de bon climat ni de mauvais
climats. Il y a une bonne ou une mauvaise adaptation de l'homme, de la
végétation et des animaux à des changements climatiques. Si nous avons des
scientifiques qui nous l'annoncent, qui nous le prévoit (le réchauffement
climatique), eh bien, au lieu de nous recouvrir la tête de cendres et de
pleurer, je pense que la meilleure solution, c'est de nous y préparer." (59:50)
Le préhistorien rappelle qu'il y a 4 raisons possibles pour
que le climat change :
Les Cycles de Milanković(des cycles astronomiques faisant que l'inclinaison de la Terre et
sa distance par rapport au soleil provoquent des périodes régulières de
glaciations)
Les éruptions volcaniques (les poussières projetées dans
l'atmosphère faisant écran à la lumière solaire et provoquant des
refroidissements allant jusqu'à une décennie)
L'activité solaire (correspondance entre le minimum d'activité
solaire commencé à la fin du XVIIe siècle et le petit âge glaciaire survenu
entre le début du XIVe et la fin du XIXe siècle (A noter que cette
période correspond également à un maximum volcanique)).
L'activité humaine.
La petite remarque gênante.
Dans la deuxième partie de la conférence, celle réservée aux
questions, François Djindjian fait cette remarque "gênante" :
"La fin du petit âge
glaciaire, c'est la fin du 19ème siècle et une partie du
réchauffement climatique que nous avons, même si je n'ai pas le droit de le
dire, parait-il, c'est quand même, c'est la fin du petit âge glaciaire, plus,
effectivement nos activités industrielles à la fin du 19ème siècle" (1:37:36)
Concernant les modélisations mathématiques, (je vous rappelle
qu'il est aussi mathématicien), il précise :
"Les calculs de modélisation
du climat sont d'un ordre beaucoup plus compliqué que ce que nous montrent les
articles à sensation que l'on peut voir dans la presse" (1:38:10)
Il ajoute :
"S'il y a des vrais scientifiques, des vrais
mathématiciens dans cette salle, ils vont me comprendre. Les modèles
météorologiques, les modèles climatiques, sont des modèles d'une complexité fabuleuse
et il faut des mégas ordinateurs pour pouvoir les traiter. Alors si vous voulez
faire un travail sérieux, ce n'est pas en trois ans. Cela demande des décennies et
des décennies pour arriver à mettre au point les modèles. C'est pour ça que
nous, comment dire, on est un peu réservés face à l'aspect spectaculaire et catastrophiste
de que l'on lit dans la presse (1:38:45) et puis notre vieille formation
scientifique qui nous dit que quand même, quand on dit des choses, il faut
rester prudent, humble et surtout il faut toujours travailler et toujours
discuter, et surtout quand le politique s'en mêle et que vous savez que quand
le politique s'en mêle, c'est quand il trouve une occasion que ce genre de
chose soit l'occasion de faire un nouvel impôt… Nous dans la préhistoire, on
est quand mêle contents, un million d'habitants sur la planète, des chasseurs cueilleurs,
des variations climatiques, c'est vachement simple. Là aujourd'hui, je n'aimerais
pas être à leur place. Je préfère être préhistorien."
Voilà, je vous laisse regarder la vidéo. Dépêchez-vous de
l'oublier ensuite et surtout n'en parlez à personne. 😉
Quant aux causes de l'actuel réchauffement climatique, elles sont effectivement le résultat de l'activité humaine. Il suffit de lire l'article suivant pour le comprendre : "Le mème de Transitio sur le climat ( Si ça peut aider)"
Depuis plus de 10 ans qu'existe Transitio, j'ai évoqué
nombre de questions, nombre de sujets de société tournant autour de la
transition. J'avais déjà traité de la notion de pouvoir (S'en déprendre, plutôt que le prendre). Mais aujourd'hui je vais vérifier si nous avons vraiment le pouvoir d'agir. Et je gage que vous allez être déçus.
Un changement trop lent
La situation est plus claire à présent. Ce qui relevait il
y a dix ans du confidentiel est traité partout ou presque (lire "Le double langage des élites" publié en 2011). On parle plus du
changement climatique que de la fin des énergies fossiles, mais qu'importe,
puisque lutter pour sauvegarder un climat vivable, va de pair avec économiser le
peu d'énergies fossiles qui nous restent et retarder le choc civilisationnel d'une
crise majeure d'approvisionnement énergétique. Je ne saurais d'ailleurs dire, lequel de ces
deux fléaux indissociablement liés nous abattra le premier, ou pas.
Il existe bien un déplorable déni vis-à-vis du réchauffement
climatique, mais il en existe un autre vis-à-vis de l'énergie. Les uns ne
veulent pas voir les hivers de plus en plus doux et les étés de plus en plus torrides
et les autres croient fermement que le pétrole sera remplacé par une nouvelle
énergie miraculeuse. Les uns nient leur propre perception du réel et les autres
ne disposent pas de suffisamment de connaissances en physique pour comparer la
miraculeuse densité énergétique du pétrole avec une autre énergie. Passons.
Malgré tout cela, la société change, lentement, mais elle
change. Mais comme je l'ai écrit dans un précédent article, de tels changements de
société ne peuvent se faire en une seule génération. J'ai également expliqué
dans un précédent article qu'une décarbonation de notre modèle de société était
dorénavant techniquement possible.
Il nous faut impérativement apprendre à consommer moins. Ça
aussi c'est techniquement possible comme l'explique si bien Matthieu Auzanneau
dans la vidéo ci-dessous. Cela ne demande même pas des investissements gigantesques,
seulement une évolution de nos modes de vies. Et qui plus est, ces nouveaux
modes de vies amélioreraient nos qualités de vies !
Alors, qu'est-ce qui coince ?
Pourquoi avons-nous cette impression justifiée que malgré
tout, les choses ne vont pas assez vite ?
Il n'y a pas que nos modes de vies qui sont inadaptés à
notre changement d'environnement. Je pense que nos politiques sont eux aussi
obsolètes et totalement contre-productifs.
Dans la vidéo ci-dessus, Matthieu Auzanneau dit à un moment
:
"A une époque où les problèmes sont techniques, on
croit encore que l'on peut faire de la politique, comme avant la révolution
industrielle. Les règles du débat politique sont antérieures à la révolution
industrielle et les politiques méprisent, ignorent, le fait que nous sommes
enchâssés dans des systèmes techniques qui sont plus puissants que nous."
Il a tout à fait raison. Nous avons des dirigeants qui se
prennent pour Louis XIV ou Napoléon et qui croient qu'il suffit de dire, pour
que cela soit. Notre président actuel constitue à lui seul un triste exemple.
Mais il n'est pas le seul dans son cas. Il fait partie de cette nébuleuse de
gens de pouvoir qui dirige le monde selon un unique modèle de société, un
modèle périmé, reposant sur l'exploitation illimitée des ressources et des
hommes. Ce n'est ni bien ni mal. Ce modèle a même été utile un temps pour faire
progresser une grande partie de l'humanité (sciences, médecine, alimentation,
éducation, etc.) Oui mais voilà, ce modèle imparfait qui était plus ou moins
adapté à un moment donné de notre histoire, nous conduit à présent à notre
perte.
Le problème se double du fait que si nos hommes et femmes politiques sont
inadaptés à la situation, leurs électeurs le sont également. Du moins ceux qui
croient encore qu'il suffit de voter pour l'un ou pour l'autre pour que les
choses changent. Car en fait, le choix n'existe pas. Il n'y a pas d'alternative
à ce système, comme disait l'ancienne première ministre britannique Margareth
Thatcher.
Nos classes politiques dirigeantes suivent toutes le même
modèle. Pourquoi en changeraient-elles me direz-vous, puisque c'est celui qui
les a conduites au succès ? Ce n'est pas la seule raison. Elles n'ont pas,
elles non-plus, la liberté de changer...
C'est avec plaisir que je l'ai retrouvé et que je vous le
donne à lire, ci-dessous. Dans son livre « Comprendre le pouvoir », Noam
Chomsky montre qui détient vraiment le pouvoir politique, en mentionnant pour l'exemple deux
articles révélateurs parus dans la presse économique en 1992 et 1993 :
Extrait du chapitre 10 ‘‘ Le tournant’’, pages 278 à 280
dans l’édition française chez ‘‘aden’’.
Les parties en rouges sont terribles !
« … immédiatement après les élections de 1992, le Wall
Street Journal a publié un article en première page informant ses lecteurs
qu’il n’y avait aucune raison de craindre que les soi-disant ‘‘gauchistes’’
entourant Clinton agissent différemment en prenant leurs fonctions. Bien sûr,
le milieu des affaires le savait parfaitement, comme vous pouvez le voir en
observant les marchés financiers vers la fin de la campagne électorale. Quoi
qu’il en soit, le Wall Street Journal expliquait pourquoi, c'est-à-dire que si
par accident Clinton ou tout autre candidat essayait bel et bien d’initier un
programme de réforme sociale aux Etats-Unis, on y mettrait fin sur le champ. Ils
n’ont fait que rappeler l’évidence et donner les chiffres.
Les Etats-Unis sont profondément endettés – en réalité, cela
faisait partie de l’ensemble du programme Reagan / Bush : endetter le pays au
point que le gouvernement n’ait presque plus aucun moyen de conserver leurs
programmes de dépenses sociales. Et le véritable sens de « être endetté »,
c’est que le Département des Finances a vendu énormément de titres,
obligations, etc. – aux investisseurs, qui se les échangent ensuite sur le
marché obligataire. D’après le Wall Street Journal, actuellement, environ 150 milliards
de dollars sont échangés chaque jour de cette façon uniquement en bons du
Trésor. L’article explique ensuite ce que cela signifie : cela signifie que si
telle ou telle mesure du gouvernement américain déplaît à la
communauté d’investisseurs qui détient ces titres, cette dernière peut très
rapidement vendre une toute petite quantité de bons du Trésor en guise de
signal, ce qui aurait pour effet immédiat d’augmenter le taux d’intérêt de 1%
et d’aggraver le déficit de 20 milliards de dollars en une nuit – autrement dit
si Clinton (dans une hypothèse improbable disons) proposait un programme de
dépense sociales à 20 milliards de dollars, la communauté internationales des
investisseurs pourrait instantanément le transformer en budget de 40 milliards
de dollars, rien qu’avec un signal, et toute autre mesure en ce sens serait
alors avortée.
De même, un excellent article est paru dans l’Economist de
Londres – vous savez, ce journal spécialiste du libre-échange et de l’idéologie
populaire – au sujet du fait que les pays de l’Europe de l’Est se sont remis à
élire des socialistes et des communistes au pouvoir. Mais le message de fond de
l’article, c’était ne vous inquiétez pas, parce que disaient-ils, « la
politique du gouvernement restera exactement telle quelle est parce qu’on les
tient par les couilles : c’est nous qui contrôlons les monnaies
internationales, et nous sommes les seuls à pouvoir leur accorder des prêts,
nous pouvons détruire leur économie si ça nous chante, ils ne pourront rien
faire. Ils peuvent jouer n’importe quels jeux politiques et même prétendre être
en démocratie si ça leur fait plaisir – tout ce qui leur chante – tant que « la
politique du gouvernement ne dépend pas des politiques ».
Pourquoi d'après-vous, les Socialistes français des années
80 n'ont-ils jamais pu appliquer leur
programme et qu'ils ont même dû rapidement faire marche arrière ? François Mitterrand
appelait cela "le pouvoir de l'argent"…
Les choses n'ont fait qu'empirer depuis, car nous avons même
porté au pouvoir en 2017 un jeune banquier qui s'était fait fabriquer un
costume d'homme politique en quelques mois à coup d'argent ! Son programme
était simple, c'était celui de la finance, affaiblir les services publics,
convaincre les gens que ce serait moderne et plus efficace de les privatiser,
puis les brader à des sociétés privées qui gaveraient d'argent d'heureux
actionnaires.
L'exemple suivant constitue un bon exemple de ce que je viens de vous expliquer ci-dessus.
La "pseudo crise" des retraites.
Si vous avez lu le texte ci-dessus, peut-être commencez-vous de comprendre pourquoi le président Macron, qui s'était engagé en 2019 à ne pas repousser l'âge légal du départ en retraite (voir la vidéo ci-dessous), a finalement fait passer cette réforme en force.
"Mes bons amis, travaillez plus longtemps"
Le président Macron, tout fanfaron qu'il est, faisant étalage de sa prétendue compétence à grand renfort de discours pleins d'assurance insolente, ne fait en vérité qu'obéir aux marchés financiers.
Amis lecteurs de droite, ne vous hérissez pas et de grâce continuez de lire, vous me remercierez.
J'avais expliqué sur Transitio en avril 2017, grâce à un article du Wall Street Journal, d'où venait Emmanuel Macron, c'est-à-dire du monde de la finance. A grand renfort d'argent et d'ingénierie sociale et grâce à l'idiote utile Marine Le Pen, M. Macron a été mis en place pour réaliser le cahier des charges fixé par les marchés financiers.
S'il n'applique pas les exigences des banques des marchés financiers, c'est très simple, les agences de notation comme Fitch, Standard & Poor's ou Moody's dégraderont la note de solvabilité de la dette de la France et les taux d'emprunts pour financer la politique publique et l'économie française dans son ensemble augmenteront.
La réforme des retraites ayant trop trainé, le 28 avril 2023, l'agence de notation Fitch a dégradé la note de la France de AA à AA-.
Conclusion ?(Non)
Alors voilà braves gens, vous pouvez toujours aller voter, mais vous n'êtes pas près de voir un gouvernement appliquer la réforme
sociétale de grande ampleur, nécessaire pour nous éviter une crise majeure.
J'en viens parfois à me demander si l'apparence de démocratie dans laquelle nous vivons ne sert pas qu'à reporter sur nous la responsabilité des décisions de nos maîtres et à nous faire culpabiliser ; la culpabilité étant un outil de manipulation depuis la nuit des temps.
Mais alors, que faire ?
Les actions individuelles ? Citoyennes ? Voire mieux écocitoyennes
? Elles sont totalement inefficaces pour changer la société, mais elles vous
aideront un peu à vous préparer à la crise. Là encore, on profite de votre
manque d'information pour vous faire croire que raccourcir votre temps de
douche, manger bio, trier vos déchets et aller au boulot à vélo, participera au
changement nécessaire. Dans les chiffres, c'est absolument faux. Votre impact personnel
est pathétiquement nul. Pire ! Même si dans un élan salvateur, la majorité de
la population s'y mettait l'impact serait lui aussi minime.
Regardez cette vidéo, vous allez mieux comprendre :
Pour avoir les sous-titres en français, cliquez sur la petite roue d'engrenage en bas à droite et sélectionnez la langue.
(Ne vous laissez pas décourager par l'introduction maladroite).
Cette idéologie de la responsabilisation des citoyens
participe du même modèle managérial que celui qui nous est imposé dans le monde
du travail. En effet, dans celui-ci, il n'y a plus d'employés ni d'ouvriers, il
n'y a que des collaborateurs, des partenaires "responsables". La
différence qui en résulte, c'est que si vous ne vous acquittez pas bien de
votre fonction, ce ne sera jamais parce qu'on ne vous aura pas assez donné de
moyens ni de temps pour la réaliser correctement, ce sera à cause de vous, vous
qui êtes un agent responsable et non plus un simple exécutant. Le vice est
poussé encore plus loin lorsque l'on vous invite à créer votre propre emploi
quand il n'y en a plus autour de vous ! Comment ? Vous n'avez pas de travail ?
Mais traversez la rue ! Achetez-vous un costume et créez votre startup !
L'incitation à la démarche individuelle est un leurre. Son
but réel n'est pas de faire de vous un acteur du changement, mais de reporter
sur vous l'échec du changement.
Ne soyez pas dupes non-plus des luttes mesquines dans lesquelles on veut vous engager. Comme aux USA depuis longtemps, les luttes sociales sont à présent interdites, seules sont tolérées les luttes sociétales. Pendant que vous vous disputez avec vos voisins à propos des droits de communautés persécutées ou ayant été persécutées, la vraie persécution de grande ampleur se déroule sans heurts, celle de la misère grandissante !
Ne vous méprenez pas sur ce que je dis. Bien sûr que c'est
nécessaire et louable d'être un citoyen responsable. Mais qu'il s'agisse d'un
citoyen responsable de ses propres décisions, pas de celles des d'autres !
Alors voilà, je suis désolé. Triste constat, le vote est inutile
et l'action individuelle est inefficace. Hein ? Quoi ? L'action collective ?
Pff…
Une intuition...
Je ne veux pas terminer cet article d'une façon aussi
défaitiste ou désabusée. En écrivant ce texte, je me suis souvenu d'un article
que j'avais écrit en février 2013 sur Transitio : "Révolution ou évolution ? Soyons le changement !"
Dans mon style de l'époque, je me demandais si la solution
ne pourrait-elle pas être "tout simplement", de "tourner le dos
aux murailles du kafkaïen château de l’ordre établi". Oui, je
sais, de telles phrases peuvent décrédibiliser une idée. Mais telle que j'en
avais l'intuition, l'idée était celle d'une sorte de démission. Il ne
s'agissait pas de quitter la société avec pertes et fracas en claquant la porte.
Mais plutôt de ne plus suivre la règle de ce jeu mortel dans lequel il n'y
a de toute façon rien à gagner. Une sorte de pas de côté, une démission.
Il faut dire que depuis 2013, nos gouvernants ont tout fait
pour nous décourager en nous brossant un avenir affreux. Et comme si l'idée de
devoir travailler jusqu'à 70 ans dans des conditions précaires avec une faible
couverture sociale et une hypothétique retraite réduite au minimum ne suffisait
pas, ils se sont même efforcés de de nous convaincre que nous n'aurions pas
d'avenir du tout à cause de la catastrophe climatique ! Les plus vieux
d'entre-nous, habitués à courber la tête sous le joug et plus influencés par l'ingénierie sociale (Média "mainstream", télé, journaux, etc) n'ont pas réagi. Mais
chez les jeunes, un nouveau mouvement apparait sous la forme d'une vague de
démissions. J'ai connu les prémisses de cela la dernière année de mon travail, en 2018, où j'ai vu plusieurs jeunes ingénieurs refuser de jouer "le jeu" et démissionner. L'un d'entre eux, le plus brillant, refusant de se compromettre dans les magouilles des marchés publics et de s'épuiser à travailler sur des études inutiles, est devenu charcutier !
Il y a une certaine logique à cela. Nos Etats ont rejeté la notion d'Etat providence et ils insistent depuis des années pour que nous soyons tous des citoyens responsables, c'est-à-dire, ne comptant que sur nous-mêmes.
Si l'Etat n'assume plus sa fonction de protection, si les entreprises ne nous payent pas de façon que nous puissions vivre décemment, à quoi bon souscrire au contrat social ? A quoi bon travailler jusqu'à l'épuisement en vivant pauvrement ?
Aux États-Unis, 4,5 millions de personnes ont volontairement
quitté leur emploi pour le seul mois de novembre 2021, soit 3 % de la
population active ! Ce mouvement arrive en France également. Même en Chine, "l'usine
du monde" de jeunes cadres lèvent le pieds et lancent sur les réseaux
sociaux, le mot d'ordre du "tangping" ! Lisez cet article : "La grande
démission n'est pas une fatalité".
Tangping
Je ne dis pas que c'est la solution. C'est une intuition. Juste une intuition...