Ouh la ! Attention ! 😲
Introduction précautionneuse
Voici un article bien particulier, qui m'a demandé beaucoup de travail. Je tiens à préciser également que c'est volontairement que j'ai utilisé cette expression qui est devenue un cliché médiatique :"De quoi est-il le nom ?" (Lire cet excellent article de Didier Pourquery).
J’ai conscience de m’avancer sur un terrain miné en vous invitant à réfléchir sur la personnalité de Maximilien Robespierre.
L’image du terrain miné est d’ailleurs trop faible ! En effet, j’ai le sentiment que vouloir parler de Robespierre en France, c’est comme se promener sans le savoir, le long de l’une de ces terribles failles qui parcourent la croûte terrestre et qui sont causes de tremblements de terre ou d’éruptions volcaniques.
Dans le cas présent, je pense à cette dangereuse faille qui traverse toutes les couches de la société française, et pas seulement, depuis 1789. Une faille qui traverse même les familles !
Le sujet me semble si dangereux, que je vais même invoquer à mon secours les mânes du général De Gaulle !
Intervention divine
"Le grand Charles" disait à propos de la France : "Ce n’est pas la gauche, la France ! Ce n’est pas la droite, la France ! Naturellement, les Français, comme de tout temps, ressentent en eux des courants. Il y a l’éternel courant du mouvement qui va aux réformes, qui va aux changements, qui est naturellement nécessaire, et puis, il y a aussi un courant de l’ordre, de la règle, de la tradition, qui, lui aussi, est nécessaire. C’est avec tout cela qu’on fait la France. Prétendre faire la France avec une fraction, c’est une erreur grave, et prétendre représenter la France au nom d’une fraction, c’est une erreur nationale impardonnable." ; Il disait aussi "Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromage ? ".
Le grand homme a trouvé (pendant un temps) une solution au paradoxe français en inventant une France qui n’existait pas et dans laquelle les Français ont pris plaisir à ne pas se reconnaître (en particulier celle d’une France résistante qui se serait libérée de l’occupation allemande par ses propres moyens). Lui qui avait si bien compris ce qu’était la France avait aussi dit que les Français étaient des veaux (mais c’était en juin 1940).
Un pays impossible ?
En fait, la France, de par sa composition, et ce depuis toujours, est un pays compliqué, voire presque impossible. Un pays impossible parce que constitué d’une mosaïque de cultures régionales bien différentes, avec des paysages, des langues, des architectures, des cuisines, voire mêmes des religions différentes (Catholiques, Juifs, Protestants et à présent Musulmans).
On retrouve bien sûr de tels mélanges dans d'autres pays, mais il semble que depuis le début, un processus bien particulier soit à l'origine de cet assemblage français ; comme une recette de cuisine différente.
Les populations ont évolué, voire changé complètement au fil des siècles. Mais ce qui fait tenir cet impossible puzzle n'a pas changé. Un étrange lien semble relier toutes ces différences. Ce disant, je ne parle pas des chaînes qu’une succession de despotes, royaux ou républicains, auraient voulu leur imposer de force. Je pense à autre chose...
(Savez-vous que la culture contribue sept fois plus au PIB de la France que l'industrie de l'automobile ?)
Si la culture a eu autant d’importance pour les Français, jusqu’il y a peu de temps encore, c’est peut-être parce que la France ne peut se retrouver unie que dans le monde des idées. Les Français ont besoin de se rêver, et si possible de se rêver grands, pour se sentir un seul peuple. Sinon ils retombent dans les mêmes luttes intestines que celles qui déchiraient les gaulois au grand bonheur de Jules César lorsqu'il se lança dans la guerre des Gaules.
Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Il y a eu tant d'invasions et de courants migratoires divers en France depuis le temps des gaulois, que bien peu de français ont des ancêtres gaulois.
Cependant, l'état d'esprit semble perdurer. Par exemple, je peux vous assurer, après avoir longuement discuté avec un jeune chauffeur de taxi français d'origine tunisienne il y a quelques temps, que ce dernier arrivant était devenu un excellent ambassadeur de l'esprit "gaulois" ! (N'en déplaise aux représentant de ce parti qui représente le côté obscur de la France, le FN, et qui affirme que ces derniers arrivants ne sont pas assimilables !).
Une question de climat ? de langue ?
C’est un peu comme si un état d’esprit s’attachait à un espace géographique, et ce, quels qu'en soient ses occupants successifs. On retrouve ici la vieille théorie des climats, évoquée par Montesquieu dans l’esprit des lois, mais déjà pensée dans l’Antiquité.
Cette théorie ne parait pas aussi invraisemblable que ça, si l’on s’intéresse à la société française actuelle. Sinon comment peut-on expliquer que des Français dont les grands parents étaient étrangers adhérent aux idées de l'anachronique Front National ?
Imaginez-vous, amis étrangers qui me lisez, qu’un gars faisant profession d’humoriste, M. Dieudonné M'bala M'bala, né en France d’un père camerounais de la tribu des Ewondo et d’une mère bretonne, se croit même obligé de donner dans l’antisémitisme et le négationnisme ! Reconnaissons que cet effort d’intégration à une certaine France, va vraiment très loin ! La question pourrait même se poser de savoir si les derniers arrivants deviennent chauvins et racistes parce qu'ils pensent que les Français sont ainsi, où s'ils ont hérité cet état d'esprit de leurs cultures d'origines.
Paysage ou langage ?
Je ne veux pas nous éloigner trop loin du sujet de cet article, mais songeant à cette étrange persistance culturelle, nous pourrions également nous intéresser à l'hypothèse défendue par Edward Sapir et Benjamin Lee Whorf, qui soutient que la façon dont nous percevons le monde dépend du langage que nous utilisons. Si le sujet vous intéresse, recherchez Sapir-Whorf...
Racontons-nous des histoires
Parmi les choses qui font rêver les Français, il y a leur histoire...
Cliquez sur l'image, le lien est super !
L’histoire, ce n’est un secret pour personne, a aussi pour fonction de créer des mythes, des mythes fondateurs, mais aussi des mythes unificateurs.
Comment ne pas évoquer, l'histoire telle qu'elle est écrite dans les manuels scolaires selon les besoins de l'époque ? Il est intéressant, par exemple, de lire comment la guerre de 1870 et plus particulièrement la Commune de Paris qui la suivie, sont décrites dans un manuel de 1907, puis en 1931, après l'horrible boucherie de 14-18...
La recherche de la vérité en histoire est en effet bien vaine que dans toutes les sciences, qu'elles soient dites "humaines" ou "dures". Il n'y a semble-t-il qu'en religion que l'on puisse parler de vérité, ce grâce à l'ignorance.
Ce n’est pas parce qu’un type était présent dans la cohue de la bataille de Waterloo, par exemple, qu’il aura mieux compris l’ensemble des tenants et aboutissants de cette défaite, qu’un historien qui mille ans plus tard lira tous les documents sur le sujet, depuis les lettres des soldats à leurs familles jusqu’aux livres de comptes de Nathan Mayer Rothschild sans qui la victoire anglaise eut été impossible faute de prêts financiers. L’un et l’autre ne comprendront de cette bataille que ce que leur culture personnelle leur permettra de comprendre.
D’un même événement, d’un même livre, chacun ne retient que ce qui lui ressemble. C’est tout le problème de la subjectivité.
De cet article, vous ne retiendrez que ce qui entre en résonance avec ce qui compose votre personnalité, y compris vos à priori et vos préjugés.
Quelle Nation ?
L’histoire sert aussi à créer un inconscient collectif, sentiment bien utile pour fédérer des gens de sensibilités diverses au sein d’une nation. Ah mais j’oubliais, l’idée de nation, elle aussi, fait polémique de nos jours en France. Au 18ème siècle pourtant, cette idée n’était rien d’autre qu’une façon de désigner le fameux contrat social passé entre les membres d'une société, comme Jean-Jacques Rousseau avait commencé de le penser.
Comme le rappelle si bien l'historien Jean-Paul Bertaud dans son beau livre "Valmy, la démocratie en armes" :
"En 1792, la Nation est, pour ceux qui y sont attachés, la communauté des hommes libres et égaux, vivant sous des lois qu'ils se sont données par l'intermédiaire de leurs députés, de "leurs mandataires". Souveraine, elle est ouverte à tous les hommes. La nationalité vient du "sol" et non du "sang". L'étranger qui vit, travaille et accepte les lois françaises est reconnu comme Français."
Pour être français, en 1792, il suffisait donc d’aimer la liberté. Les volontaires qui criaient « Vive la Nation ! » sur le champ debataille de Valmy, n’avaient rien à voir avec les hurluberlus xénophobes auxquels vous pensez. Il y avait même des étrangers dans les rangs de cette composite armée française constituée d'hommes de lignes et de volontaires : Des Belges, des Allemands et même un Vénézuélien, le général Miranda ! (Savez-vous que deux compagnies de volontaires du Sénégal participèrent aux guerres de la Révolution française ?).
Des étrangers furent même élus à la Convention Nationale, l'Anglais Joseph Priesley, l'Américain Thomas Paine, l'Allemand Anarcharsis Cloots...
Cette nation-là était ouverte à tous, sans distinction de races ni de religions. Pas grand-chose à voir avec le nationalisme formulé pour la première fois en 1892 par Maurice Barrès, cette perversion si utile à la politique industrielle protectionniste de la France du 19ème siècle.
L'objectif était, comme le dit si bien Pierre Rosanvallon (La Société des égaux) de : "trouver un corps socialement plus consistant au peuple introuvable de la démocratie électorale".
Le côté dangereux...
Lorsqu’ils ne rêvent plus, les Français peuvent devenir dangereux et pas seulement pour eux-mêmes.
A l'époque de la défaite cuisante de la France en 1870, le britannique Cecil Rhodes, théoricien de la colonisation, disait : "Si l’on veut éviter la guerre civile, il faut devenir impérialiste".
Comme l’explique Pierre Rosanvallon dans le même ouvrage (La société des égaux) : "En France tout particulièrement, la politique d’expansion coloniale, a également participé d’un travail idéologique de constitution d’un sentiment collectif fondé sur la satisfaction de promouvoir une entreprise conquérante et de manifester une supériorité commune par rapport à des peuples que l’on prétendait civiliser. La mise scène de cette supériorité partagée contribuait aussi à desserrer la tension de classe dans le pays.".
Lisez plutôt cet extrait du manuel scolaire de 1931 dont je vous parlais plus haut, qui explique la vraie raison de la conquête de l'Algérie et du début de l'ère coloniale française au 19ème siècle...
"En réalité, Charles X et Polignac cherchaient à ce moment un succès militaire pour faire accepter au pays leur politique de réaction."
"Si l’on veut éviter la guerre civile, il faut devenir impérialiste" (Cecil Rhodes) Vraiment ?
On pourrait se demander si, consciemment ou non, (je suis gentil), nos présidents successifs n'auraient pas cette folle idée en tête lorsqu'ils mènent régulièrement des petites guerres d’opérettes (meurtrières tout de même), pour faire frissonner de plaisir les français endormis (et aussi garantir l'accès de Total et Areva à de précieuses ressources au Niger, au Mali, ou en Centre Afrique par exemple).
Les méchantes guerres coloniales
Sauvegarde PDF de l'article sur le déploiement des troupes françaises et américaines en Centrafrique.
Quelle République ?
L'abolition de la royauté, entraînant l'instauration de la République, le 21 septembre 1792 au lendemain de la victoire de Valmy, est l’un des actes fondateurs de l’unité nationale française.
Les principes fondamentaux de la République française sont énoncés dans sa devise : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Ils se traduisent par des droits intangibles, à la fois politiques et sociaux, qui ont été reconnus aux citoyens par les différents régimes républicains. L’article 1er de la Constitution s’inscrit dans ce cadre puisqu’il proclame que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ».
« Une République indivisible » : aucune partie du peuple, ni aucun individu, ne peut s’attribuer l’exercice de la souveraineté nationale. Seul le peuple exerce cette souveraineté par la voie de ses représentants (ex : les députés) ou du référendum. L’unité et l’indivisibilité garantissent une application uniforme du droit sur l’ensemble du territoire national.
Une République inquiète...
Cette volonté d'unité nationale se retrouve dans toutes les couches de la société française (à droite comme à gauche). C'est une des raisons pour lesquelles, par certains de ses côtés, le grand projet européen inquiète nombre de Français. Une Europe des régions, que certains voudraient voir naître (en confondant sentiment national et nationalisme), serait un vrai cauchemar pour la majorité des Français (N'en déplaise à nos élites), une sorte de retour à "l'ancien régime".
La carte ci-dessous, que j'ai trouvée sur le web, constitue un exemple de cette "peur nationale", que l'on trouve bien sûr plus particulièrement dans les milieux extrême droite à tendance complotiste.
Europe des régions |
Mais Robespierre dans tout ça ? Me demanderez-vous !
Robespierre symbolise presqu’à lui seul cette grande vision que fut la Révolution française ; vision d’espoir pour beaucoup, mais aussi vision d’horreur pour d’autres.
La Révolution Française fut une formidable éruption de cette "impossible France" dont je parlais plus haut. Les notables qui l’ont initiée en demandant la réunion des états généraux ne songeaient pas à abattre la royauté et encore moins à changer l’ordre du monde. Comme le disait Barnave en 1790 : "Une nouvelle distribution de la richesse, appelle - c'est‐à‐dire exige - une nouvelle distribution du pouvoir."
Il ne s’agissait que de cela, une nouvelle classe sociale, la bourgeoisie, prenait conscience de sa force et réclamait la place occupée par une noblesse oisive et inutile au pays. Tout aurait pu se passer "à l’anglaise", quelques débats bien menés, une constitution bien rédigée et une monarchie constitutionnelle aurait pu voir le jour.
Le problème fut que Louis XVI ne comprit rien à la situation. Les états généraux s’éternisèrent. Il renvoya Necker, puis appela le réactionnaire Breteuil et surtout il fit monter sur Paris 20.000 hommes de régiments étrangers pour effrayer la capitale. La bourgeoisie finit alors par perdre patience. Ce fut donc pour "presser le mouvement", pourrait-on dire, que certains eurent l’idée folle le 13 juillet 1789, d’armer le peuple de Paris, histoire d’effrayer ceux qui ne voulaient pas comprendre. Le peuple était miséreux et affamé. Parmi celles et ceux que l’on appelait les émeutiers, certains n’avaient pas mangé depuis trois jours ! On sait ce qui s’en suivit, le 14 juillet, prise de la Bastille…
A partir de ce moment-là, plus rien ne pouvait redevenir comme avant, la boite de Pandore était ouverte. Le peuple commençait peu à peu à se réveiller de son sommeil millénaire. Racheter les fusils distribués pour 40 sous, comme il fut tenté, ne servait plus à rien ! (Un travailleur gagnait environ 20 sols par jours, alors que le prix de la miche de pain, quand il y en avait, était de 14 sols !).
En fait, comme l'explique si bien l'historien Henri Guillemin, il y a eu deux révolutions : une fausse en 1789 et une vraie en 1792 ! (Voir en bas de page le lien pour écouter une conférence d'Henri Guillemin).
Celui que l'on n'attendait pas...
Parmi tous ces notables dépêchés à Versailles pour participer aux états généraux, se trouvait Maximilien Robespierre, un petit avocat venu d’Arras. Devenu chef de famille à neuf ans, il avait bénéficié d’une bourse qui lui avait permis de terminer brillamment ses études à Paris. Mirabeau disait de lui : « Il ira loin, car il croit tout ce qu’il dit ». Ce jeune homme n'était pas venu pour faire carrière ou pour s'enrichir en défendant les intérêts de la nouvelle classe dominante.
Robespierre n’avait qu’une seule préoccupation, la misère du peuple.
On pouvait lire ceci dans le journal de Paris du 28 octobre 1789
Compte rendu de la séance du 27 octobre à l'assemblée nationale : "Hier, monsieur Robespierre, est encore monté à la tribune. On s'est rapidement aperçu qu'il voulait encore parler en faveur des pauvres. Et on lui a coupé la parole."
Oeuvre du célèbre grapheur Avataar, dalle Robespierre à Vitry sur Seine
Mais qui était vraiment Robespierre ?
George Sand, parlant de lui, écrivit : « Soyons juste enfin et ne craignons plus de le dire, Robespierre est le plus grand homme de la Révolution et l’un des plus illustres de l’histoire ».
Pour ma part, je serais tenté de souscrire à cette petite phrase que j’ai découverte sur un site : « Il est trois sortes d'hommes : ceux qui admirent Robespierre, ceux qui ne le connaissent pas, et ceux qui, dans tous les cas, se font un devoir de mépriser l'humanité. ».
Je préfère dire qu’il y a ceux qui l’estiment ou qui l’aiment, parce qu’ils ont eu la chance de découvrir qui il était vraiment, en se renseignant sur sa vie et ses actes, ou en lisant ses nombreux discours par exemple. Puis il y a ceux qui le détestent.
Parmi ceux qui le détestent, il y a ceux qui ne le connaissent pas (la grande majorité), ou qui n’en connaissent que le chapelet de calomnies que ses adversaires colportent avec méthode depuis son exécution le 27 juillet 1794.
Mais vous avouant cela, je prends déjà parti et je risque de rebuter tous les amis qui comme moi il y a quelques années, ne connaissent de sa vie que la version de ses ennemis (Souvenez-vous, l’histoire est écrite par les vainqueurs).
Je puis néanmoins vous donner quelques idées du personnage, qui peut-être vous feront comprendre pourquoi il fut tant détesté…
Robespierre était contre la peine de mort (Discours du 30 mai 1792).
(Extrait)
"On a observé que dans les pays libres, les crimes étaient plus rares et les lois pénales plus douces. Toutes les idées se tiennent. Les pays libres sont ceux où les droits de l’homme sont respectés, et où, par conséquent, les lois sont justes. Partout ou elles offensent l’humanité par un excès de rigueur, c’est une preuve que la dignité de l’homme n’y est pas connue, que celle du citoyen n’existe pas : c’est une preuve que le législateur n’est qu’un maître qui commande à des esclaves, et qui les châtie impitoyablement suivant sa fantaisie. Je conclus à ce que la peine de mort soit abrogée."
Robespierre était pour l’abolition de l’esclavage ! "Périssent les colonies plutôt qu’un principe !" proclamait-il le 13 mai 1791, défendant la citoyenneté des gens de couleur et luttant contre la constitutionnalisation de l’esclavage ! Et puis disait-il "Il y a d'autres esclaves, qui ne sont pas noirs, qui sont blancs, ce sont ces ouvriers auxquels vous interdisez de se coaliser pour défendre leur salaire !".
Robespierre était pour l’instruction publique gratuite et obligatoire, pour les garçons et les filles, pour laquelle Le 3 juillet 1793, la Convention mis en place, sur sa proposition une Commission d'instruction publique.
Extraits du Projet de Décret sur l’Education Publique présenté par le citoyen Robespierre :
Art. I. Tous les enfants seront élevés aux dépens de la République, depuis l’âge de cinq ans jusqu’à douze pour les garçons, & depuis cinq ans jusqu’à onze pour les filles.
II. L’éducation nationale sera égale pour tous ; tous recevront même nourriture, mêmes vêtements, même instruction, mêmes soins.
Robespierre fut l’un des rares défenseurs du suffrage universel (Discours à l'Assemblée constituante du 11 août 1791).
Il pensait que d’années en années, tout de même, il finirait par y avoir de moins en moins d'analphabètes, et qu’avec le suffrage universel, les gens ouvriraient leurs yeux sur leur condition, puis comprenant les causes de leur misère, arriveraient peut‐être à faire une république d'équité.
Robespierre était pour la liberté de la presse (Discours du 11 mai 1791)
(Extrait)
L’Assemblée nationale déclare :
L’Assemblée nationale déclare :
1°. Que tout homme a le droit de publier ses pensées, par quelques moyens que ce soit ; & que la liberté de la presse, ne peut être gênée ni limitée en aucune manière.
2°. Que quiconque portera atteinte à ce droit doit être regardé comme ennemi de la liberté, & puni par la plus grande des peines, qui seront établies par l’Assemblée nationale.
3°. Pourrons néanmoins les particuliers qui auront été calomniés, se pourvoir pour obtenir la réparation du dommage que la calomnie leur aura causé, par les moyens que l’Assemblée nationale indiquera.
Robespierre était contre la guerre et les profiteurs de guerre !
Le 23 mai 1790 il avait fait voter par la constituante : "La nation française déclare solennellement qu'elle ne fera plus jamais de guerre d'agression."
Son formidable discours contre la guerre, prononcé le 18 décembre 1791 devant le club des Jacobins n'a rien perdu de sa lucidité et de sa pertinence et devrait être rappelé chaque fois qu'un fauteur de guerre brandi veut nous convaincre de la nécessité de celle-ci.
Après la victoire de Fleurus le 26 juin 1794, Robespierre avait demandé que cesse la guerre puisqu'il n'y avait plus un seul étranger sur le territoire français. Carnot était tombé dans une rage folle en disant : "S'arrêter ?! Au moment où la guerre va commencer à payer !". Et le 13 juillet 1794, Carnot envoyait à Pichegru pour son entrée en Belgique la dépêche suivante " Vous allez entrer en Belgique, Prenez tout, il faut vider le pays". Et Robespierre de dire :"mais c’est déshonorant, c’est la honte de la République !".
Mais la guerre rapportait aux affairistes, raison pour laquelle Robespierre fit supprimer, au grand dam de Danton, les fournisseurs militaires. C’est-à-dire que L'État passerait dorénavant directement ses contrats. Pour cela il fit établir 3 usines nationales d'armement : Deux usines à Paris et une usine à Brest pour l'armement maritime, ce qui fit pousser des hurlements aux affairistes !
Robespierre était pour une régulation de l’économie par l’état…
Le 4 mai 1793 Robespierre, sous l’impulsion de Robespierre, la Convention institue la loi du maximum qui règlemente le marché des céréales pour alimenter la population et les soldats. Le 29 septembre 1793, la loi du maximum général concernera les biens de consommation courante et les salaires.
La politique économique de ses adversaires, pourrait se résumer par cette phrase du Girondin, Roland : "Tout ce que l'assemblée ‐ la législative ‐ peut faire en matière économique, c'est de déclarer qu'elle n'interviendra jamais."
Peut-être commencez-vous à comprendre ?
Robespierre soutenait que la propriété doit connaître des limites…
"De même que la limite de la liberté c'est la liberté d'autrui, la limite de la propriété c'est la vie ou la dignité d'autrui" : soutenait Robespierre.
Il s’était irrité de voir la propriété qualifiée de sacrée dans la déclaration des droits de l’homme et avait argumenté en séance :"vous avez déclaré que la propriété était sacrée, demandez donc à un négrier puisque vous n'avez pas voulu abolir l'esclavage, demandez à un négrier sa propriété, il va vous montrer, vous désigner du doigt un bateau. Non je me trompe. Un vaisseau flottant, un cercueil flottant. Un cercueil flottant plein de femmes et d'enfants, d'hommes et d'enfants à la peau noire. Et il vous dira en toute conscience et appuyé par vous‐même : ceci est ma propriété. Ma propriété sacrée." Il avait ajouté "Vous savez que ce n'est pas possible, on ne peut pas être propriétaire d'êtres humains. Donc vous voyez qu'il y a une limite à la propriété !".
Pensez que les Girondins, à l’occasion de la fête de la Loi le 3 juin 1793, avait fait remplacer la devise inventée par Robespierre « Liberté, égalité, propriété », par celle-ci « Liberté, égalité, Propriété » !
Ci-dessous, peut-être la prochaine devise "Nationale"...
Bon, j’arrête là. Libre à vous de mener votre enquête sur le personnage. Comme je l’ai écrit plus haut, vous ne trouverez que ce qui fait déjà écho en vous. J’ai même vu sur un site vendéen (bien sûr) que des gens décrivaient Maximilien comme un homosexuel, pervers (bien sûr). Ce n'est pas pour rien que le mariage pour tous dérange tant les nostalgiques de l'ancien régime...
De retour "à l'ornière précédente"
Voici ce qu’écrivait Emmanuel Kant en 1798, à propos de la Révolution française (Extrait du Conflit des facultés)
"Même si le but visé par cet événement n’était pas encore aujourd’hui atteint, quand bien même la révolution ou la réforme de la constitution d’un peuple aurait finalement échoué, ou bien si, passé un certain laps de temps, tout retombait dans l’ornière précédente (comme le prédisent maintenant certains politiques), cette prophétie philosophique n’en perd pourtant rien de sa force. Car cet événement est trop important, trop mêlé aux intérêts de l’humanité, et d’une influence trop vaste sur toutes les parties du monde pour ne pas devoir être remis en mémoire aux peuples à l’occasion de certaines circonstances favorables et rappelé lors de la reprise de nouvelles tentatives de ce genre. "
"Dès le début, la Révolution française ne fut pas l’affaire des seuls Français."
Très vite en effet, tout est retombé "dans l'ornière précédente". Une nouvelle aristocratie s'est ajoutée à l'ancienne, de nouveaux maîtres ont repris les rênes du pouvoir, et tous n'ont eu de cesse de salir cet événement colossal.
A présent, nos "élites", qu'elles se disent de droite ou de gauche (hélas), dénigrent la Révolution Française depuis des décennies la Révolution Française. Mais curieusement, celle-ci fait toujours rêver nombre de français...
Les débats qui ont eu lieu durant la Révolution française sont redevenus étrangement d’actualité, et l’on peut comprendre que la nouvelle aristocratie s’inquiète que les idées de Robespierre reviennent hanter certaines âmes troublées.
Jean-François Copé par exemple, s’est spécialisé dans cette détestation de la Révolution Française qui, selon lui "a fait beaucoup de mal et a fracturé la société, elle a désappris aux français le goût de l’effort". Le président de l’UMP semble ignorer que c’est la Révolution française qui a permis que les Français de sa religion soient des citoyens comme les autres, et que Robespierre fut le seul à demander le droit de vote pour les juifs (Intervention à l’Assemblée Constituante du 23 décembre 1789).
L'histoire par les nuls...
La Révolution française fait encore peur.
La Révolution française fut un séisme qui fit trembler la peau du vieux monde, celui des cathédrales et des châteaux. Les élites regrettent amèrement le temps où nous courbions la tête lorsque passaient leurs carrosses.
Leurs petits valets se démènent donc pour nous resservir leur vision "apaisante" de l’histoire de France. Une sorte d'histoire à la Walt Disney, avec des princesses dans de beaux châteaux.
Le sympathique Stéphane Bern, royaliste déclaré (tendance orléaniste), membre du Conseil d'Administration de la Fondation Saint-Louis, nous raconte ses rêves de marquises.
Le pathétique Lorànt Deutsch, royaliste déclarée lui aussi (tendance orléaniste aussi), nous rédige des compilations d’histoire révisionniste.
Jusqu’au journal de 20h de France Télévision qui nous a resservi le 25 décembre dernier la fable usée du baptême de Clovis à la cathédrale de Reims, le fameux "acte fondateur" de la monarchie française qui fait mourir de rire tous les historiens un peu sérieux !
Attendrissons-nous sur les malheurs des princesses, surtout pas sur celui des miséreux !
(Si l'histoire de France vous intéresse "vraiment", je vous conseille de lire l'ouvrage de l'archéologue Jean-Paul Demoule, qui vient de sortir en livre de poche : On a retrouvé l'histoire de France.)
Un quart d'heure Warholien...
Certains ont dû trouver que l'on commençait à rêver un peu trop de Robespierre ces derniers temps, car des pseudos scientifiques se sont offerts leur quart d’heure de gloire Warholien en faisant connaitre leur reconstitution du visage de Maximilien d’après un moulage mortuaire.
Le visage était ingrat bien sûr, (genre orc dans le seigneur des anneaux), et les commentaires étaient de haute volée, n’en doutez pas. Les "spécialistes" avaient juste oublié que la veille de son exécution, Robespierre avait reçu une balle de pistolet tiré par le gendarme Merda à bout portant dans la mâchoire et que celle-ci était complètement disloquée…
Prochaine reconstitution de Robespierre par un historien vendéen
😉
Alors ? Chers amis, d'après-vous, de quoi Robespierre est-il le nom ?
Quelques précisions encore...
La Terreur !
Il semble n’y aura jamais de mots assez durs pour accabler les acteurs de ce moment terrible de la Révolution que l'on appelle "la Terreur".
Je n'ai pas l'intention d'en minimiser la gravité, je souhaiterais seulement la remettre dans son contexte. L'époque était violente. Les acteurs de la Révolution n'avaient connu jusqu'alors que l'arbitraire et la violence de l'ancien régime. La Révolution fut la première à se poser la question de la violence, par exemple en supprimant la torture et en remplaçant les mises à morts spectaculaires de l'ancien régime, par la guillotine. Il apparaît même, que ses chefs tentèrent le plus souvent de juguler la violence d'un peuple affamé et parfois ivre d'une volonté de vengeance, par une violence d'état.
Mais curieusement, il semble que les siècles de terreur de l'ancien régime (comme disait Michelet) ne fassent pas le poids de l'horreur devant les 17 mois de la terreur révolutionnaire.
Il serait ridicule et obscène de faire une comptabilité de l'horreur, mais peut-on rappeler par exemple que durant ces 17 mois de régime d'exception, le tribunal révolutionnaire prononça à Paris 2627 sentences capitales, alors que le massacre des Protestants lors de la Saint Barthélémy fit 3000 victimes à Paris durant l'unique nuit du 24 août 1592 ?
Robespierre ? Robespierre dirigeait le Comité de Salut Public. Ce Comité de Salut Public régulièrement élu et réélu devait non seulement mener la guerre contre toutes les armées européennes qui attaquaient la France, mais il devait également faire face à l'insurrection fédéraliste menée par les Girondins et à la révolte vendéenne. (Les Girondins, irrités par les insurrections de la Commune parisienne, dont l'un des membres, Isnard, alors président de la Convention, avait menacé le 25 mai 1793, de faire raser Paris).
Tout en menant ces terribles guerres, le Comité de Salut Public continua également de voter de nouvelles lois pour créer des institutions dont nous profitons encore actuellement.
Durant le mois qui précéda son assassinat, Robespierre, malade et épuisé, ne siégeait plus au Comité. Les exécutions redoublèrent dans le but de convaincre le peuple qu'il en était le responsable.
Le retour à la "normale"...
Après le 9 Thermidor, date de l'exécution de Robespierre. Tout rentra progressivement dans la "normalité". Le prix du pain fut "libéré" (et son prix s'envola). Un an après, il était plus facile de trouver des pâtisseries à Paris que du pain, et des gens souffrant de famine se suicidaient...
S'ils avaient pu, les adversaires de Robespierre, comme après la mort de l'hérétique Akhénaton, auraient fait effacer son nom de tous les documents (Mais Maximilien a beaucoup écrit).
A ce propos, la rancune est vraiment tenace, puisque tandis que je mets cet article à jour (le 20 mai 2014) j'apprends que le nouveau maire UMP de la ville de Marseille veut faire débaptiser la place Robespierre du 9ème arrondissement de cette célèbre ville !
Un mot sur le pauvre Danton ?
Danton, celui qui avait demandé de mettre la terreur à l’ordre du jour et qui exigeait que "tous les jours un aristocrate, un scélérat paye de sa tête ses forfaits", Danton a sa statue à Paris.
Et ensuite ?
Thiers, le responsable des 30.000 morts de la semaine sanglante de répression de la commune de 1871 (dont 2000 enfants trouvés sur les barricades, fusillés dans la prison de la petite roquette !), celui qui fit cadeau de l'Alsace et de la Lorraine aux Prussiens, tant il était pressé de récupérer les militaires français prisonniers pour écraser les Parisiens trop républicains, le "fameux" Thiers a des rues portant son nom partout en France !
Napoléon, ce militaire aventurier qui ne mena à bien que ce que la Convention avait initié et pas eu le temps de terminer, ce despote qui rétablit la monarchie absolue et qui géra l'Europe comme un mafieux corse, en faisant couronner les membres de sa famille, Napoléon Bonaparte fait l'objet d'un véritable culte. (Lisez le dernier livre de Lionel Jospin : "Le mal napoléonien").
S'ils avaient pu, les adversaires de Robespierre auraient, comme après la mort de l'hérétique Akhénaton, fait effacer son nom de tous les documents (Mais Maximilien a beaucoup écrit).
A ce propos, la rancune est vraiment tenace, puisque tandis que je mets cet article à jour (le 20 mai 2014) j'apprends que le nouveau maire UMP de la ville de Marseille veut faire débaptiser la place Robespierre du 9ème arrondissement de cette célèbre ville !
Mais pourquoi parler de la Révolution française et de Robespierre sur Transitio ?
Lisez mon article "Révolution ou évolution", qui est l’un des plus lus sur Transitio. Vous comprendrez combien je suis convaincu qu’il ne servira à rien d’incendier de nouveaux châteaux ni de couper de nouvelles têtes, pour faire évoluer le monde. Je ne suis pas un révolutionnaire, plutôt un évolutionnaire.
Alors pourquoi vous parler de cette époque si éloignée ? Ce qui m'intéresse le plus, c'est son aspect culturel. C'est en effet un moment de l'histoire où tout un peuple a décidé de changer tout, ou presque, et cela en très peu de temps.
Les droits de l'homme ont été proclamés et l'esclavage abolit. L'école publique et gratuite a été créée. Le calendrier a été changé et un nouveau système des poids et mesures a été inventé (le système métrique). La liberté de la presse a été instaurée, ainsi que la liberté d'ouvrir des théâtres et de jouer des pièces sans censures (10 nouveaux théâtres se créent à Paris). Les femmes ont gagné en liberté et proclamé leurs droits. L'homosexualité a été dépénalisée. La liberté des cultes a été déclarée pour les Juifs et les Protestants, enfin reconnus citoyens comme les autres. Le divorce a été autorisé, ainsi que le mariage des prêtres, dont les salaires ont doublé (2000 se marièrent en 1793). L’Etat a entrepris de réguler l’économie en faveur du peuple et non-pas des seuls nantis, avec le contrôle des prix (un maximum pour le pain) et le salaire minimum. Il a organisé une assistance aux orphelins, aux veuves de guerres et aux anciens. Il a favorisé les arts et les sciences en créant des académies où l’on accédait par le talent et non par les faveurs d’une courtisane.
Tout cela ne s’est pas passé d’une façon idyllique, bien sûr. C'était fou, courageux, dangereux !
Cela n'a pas duré, mais des germes de liberté furent semés dans les esprits.
Combien de ces libertés ne sont encore que de beaux rêves dans notre monde malade ?
Cela m'intéresse parce que nous sommes dans une époque de transition ou tout va bientôt changer très très vite. C’est donc passionnant d’étudier comment une population aussi différente que la notre, face à autant d’adversité et avec aussi peu de moyens, a réussi à initier tant de changements, en si peu de temps.
Je vais bientôt arrêter Transitio. Je mets une dernière fois cet article à jour, car il me tient à cœur.
Post Scriptum :
Peut-être souhaitez-vous vous faire votre propre opinion sur ce terrible Robespierre ? Si c'est le cas, je vous conseille les quelques liens suivants :
- A écouter absolument ! La conférence de l'historien Henri Guillemin en 1970 à la Radiotélévision Suisse. Il explique qui fut selon lui Robespierre, mais aussi ce que fut la fausse révolution, celle de 1789, et la vraie révolution, celle de 1792.
Le texte de cette conférence est accessible en cliquant sur ce lien : Henri Guillemin raconte Robespierre et la Révolution. (Transcription trouvée sur le site de l'inclassable Etienne Chouard)
- Si vous souhaitez réaliser un travail d'érudit, il y a bien sûr les trésors de la Bibliothèque nationale :
- Il y a aussi cet ouvrage monumental de Philippe Landeux. D’un grand intérêt historique, il est avant tout un livre de philosophie politique. En 860 pages de texte, il restitue l’intégralité des discours de Robespierre et l’essentiel de sa pensée (10 € en format pdf).
- Je ne peux bien sûr oublier de mentionner la Société des Etudes Robespierristes :
Alors ? Robespierre ? 😉
Vous commencez à comprendre ?
Je me dis parfois que si la République Française est devenue aussi laide et méprisable, c'est parce qu'elle a trop cherché à plaire à ceux qui la haïssaient. Ce faisant, elle a fini par leur ressembler et elle a perdu son âme...
Manifestation le 5 Mai 2013 à Paris
Bertrand Tièche
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